Le cimetière Chinois de Nolette / Noyelles-sur-Mer
Dans ce cimetière reposent 842 hommes. Travailleurs venus de Chine pour aider l’armée britannique pendant la première guerre mondiale, ils ne sont pas morts au combat mais ont participé à l’effort de guerre, donc à la reconquête du territoire français.
Les conditions de l’arrivée des travailleurs chinois en France
Dés 1916, la France en guerre manque de bras. Les femmes ne suffisent plus à pallier la perte des hommes mobilisés sur le front. Le 14 mai 1916, le gouvernement français passe un accord avec les autorités chinoises, qui les autorisent à recruter des travailleurs en Chine. Six mois plus tard, le gouvernement britannique signe lui aussi un accord, pour un contingent de 150 000 travailleurs, dont la grande majorité travaillera sur le sol français.
Les contrats passés avec ces travailleurs sont d’une durée de trois à cinq ans. Rédigés dans les deux langues, ils stipulent dans leur premier article que « le travailleur ne participera aucunement aux opérations militaires, il sera uniquement préposé à l’exécution de travaux agricoles et industriels ».
Le travail à Noyelles-sur-Mer
Les travailleurs encadrés par les Britanniques ou » Chinese Labour Corps » sont tous conduits, dès leur arrivée sur le sol français, dans le camp militaire britannique de Noyelles-sur-Mer, qui devient le quartier général des travailleurs chinois. Ils reçoivent ensuite leur affectation dans un des camps du territoire où ils subissent l’encadrement strict des soldats, alors qu’ils ne sont pas combattants.
Dans le camp de Noyelles, 3000 chinois travaillent en permanence et par roulement. Ils reçoivent 5 francs par jour, ce qui correspond au salaire moyen d’un ouvrier journalier français.
Leur travail consiste à décharger des munitions, à effectuer des travaux dans les fermes alentours, et a doubler la ligne de chemin de fer Paris-Calais, ligne qui ne verra finalement jamais le jour. Peu à peu, surtout vers la fin de l’année 1917, ces hommes seront confrontés à la violence des combats car ils devront déminer, ramasser les blessés et les morts, ou en déterrer à des fins d’identification.
La vie quotidienne au camp militaire de Noyelles
Les travailleurs chinois sont logés dans des baraques qui leur sont réservées. Ils n’ont le droit de traverser le village de Noyelles que par petits groupes, encadrés par un officier britannique. A tel point que la population les considère peu à peu comme des prisonniers. Cette impression est d’autant plus forte que les travailleurs sont soumis à de multiples quarantaine, dues aux maladies engendrées par leurs conditions de vie et le changement de climat. Un hôpital spécialisé est alors implanté à Noyelles.
A proximité immédiate de l’hôpital, sur le lieu de l’argilière, est installé un cimetière provisoire des travailleurs chinois, remplacé dés 1921 par le cimetière actuel, construit par la War Grave Commission.
Une grande majorité de ces travailleurs sont morts juste après la guerre, en 1920, en raison de l’épidémie de grippe espagnole.
La fin de la guerre
L’armistice signé, les autorités françaises et anglaises organisent le retour des travailleurs en Chine. Pourtant, leurs contrats n’étaient pas arrivés à leur terme et la reconstruction imposait encore un fort besoin de main d’oeuvre.
On ne connaît pas avec exactitude le nombre de rapatriés, et combien parmi eux avaient séjourné à Noyelles, mais la guerre terminée, 2000 à 10000 chinois selon les sources, seraient restés sur le sol français.
Après la guerre, les difficiles moyens de communication et l’instabilité politique en Chine, empêchent tout contact entre les hommes enterrés au cimetière et les familles restées en chine. Pourtant des échanges épistolaires et des envois de fonds ont bien eu lieu. Il faut attendre la deuxième, voire la troisième génération, pour que des familles se fassent connaître.
Un cimetière du Commonwealth particulier
La politique mémorielle de l’empire britannique prônait un enterrement à l’endroit même où les soldats étaient tombés, sans distinction de grade, de race ou de croyance. Ainsi, les phrases en anglais gravées sur les pierres tombales sont toutes les mêmes, à quelques variantes près.
Pourtant ce cimetière entretenu par la Commonwealth War Graves Commission se distingue à travers maints signes : le nom des hommes et la porte d’entrée « sinisante » sont gravés en idéogrammes chinois et les essences des arbres pins et cèdres sont inhabituelles.
Chaque année, le cimetière accueille une centaine de représentants de la diaspora chinoise, venus de toute la France pour y célébrer la Fête de Qingming, fête des morts qui annonce aussi l’avènement du printemps.
Car Noyelles est le seul cirnetière qui soit entièrement consacré aux travailleurs chinois de la Grande Guerre et à la mémoire de ces hommes, premiers immigrés chinois en France.
0 commentaires